Le vin, le corps et la santé
Une évolution de leurs représentations du XVIe au XIXe siècles

Serge FAUCHE
Professeur
Université de Bordeaux 2
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Marie-Hélène ORTHOUS
Doctorante
Université de Bordeaux 2

Dans l'histoire des hommes et des soucis qu'ils expriment pour conserver ou retrouver la santé, le vin fut une boisson à la fois privilégiée et ambivalente. Vin rouge ou vin blanc, vin vieux ou vin nouveau, compositions aromatiques ou médicinales, voilà quelques breuvages auxquels les médecines du XVIe au XVIIIe siècles font allusion. Entre les vins "pour conforter la jeunesse" qui favorisent la digestion et augmentent la chaleur naturelle et ceux qui préviennent ou guérissent les maladies telles la peste ou la rage ; entre le vin qui égare les sens et celui qui donne la fièvre et fait mal à la tête, existe un univers d'images propres à l'histoire des inquiétudes de l'homme vis à vis de son corps et de son destin.

Mais au début du XIXe siècle, ces images changent sous l'effet d'une double détermination. Détermination "scientifique" d'abord, avec la primauté accordée désormais aux "fonctions cérébrales" pour expliquer les états de santé et de maladie ; raison sociale ensuite, avec les grandes entreprises d'hygiène physique et morale caractéristiques de ce temps. Les représentations des bienfaits ou des vices donnés le vin sont l'enjeu de débats dépassant les seules perceptions individuelles d'un corps sain ou malade. C'est d'ordre social dont il est maintenant question. Voilà la trame historique possible des enjeux d'une boisson profondément enracinée dans la vie des hommes, hésitant entre les plaisirs et les souffrances dont elle pouvait être la cause.