"Sourdoit du temple un ruisseau de vin"
A propos des Andriens selon Philostrate
et de quelques autres tableaux
Michel COSTANTINI
Professeur
Université de Paris 8
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Chez le rhéteur Philostrate (Eikones, vers 250 de notre ère) "l'œil écoute (…), sent (…) touche et caresse (…) goûte et savoure (…)." Le singulier pédagogue veut émouvoir le concert des cinq sens par la mise en mots de l'image virtuelle : du visible intelligible, posant question de la signification ("Que veut dire… ? Que signifie… ? Pourquoi… ?"), il amène au visible sensible, sensible au cœur, organe du désir. " Question intersémiotique : Comment dire en mots ce que dit la peinture en pigments assemblés de ce que dit, et vit, le corps ? Là, il vit allègrement, palpite, les muscles se bandent, le péronier fait saillie, le jumeau se gonfle, l'œil est vif : ivres gais de la figuration classique, sur les vases à boire notamment. Ici, l'hésitation et l'oscillation sont reines, jusqu'à la chute, jusqu'à l'abandon au sommeil, de l'homme appuyé sur l'outre vide -ivres-morts du quatrième siècle (a.C.) et après. Plusieurs des eikones comportent ainsi des enivrés du deuxième type, Silène dans Les Iles, ou la divinité éponyme dans Komos, qui, " la trongne enluminée pour le trop de vin qu'il a bu " (tr. de Vigenère 1578), s'endort tout debout, en perd le sens du toucher, et n'entend plus guère la mélodie des crotales et des flûtes. On mènera l'enquête à partir des Andriens, œuvre qui rassemble autour du vin nombre de pratiques, humer, taster, avaler, nombre d'effets comportementaux, pérorer, rire, chanter, danser, etc.
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